Sans vouloir généraliser, on arrive encore trop souvent, malheureusement, à des situations où l'assuré est la victime de la soif des commissions de certains agents d'assurances...

Voici quelques exemples parmi des dizaines d’expériences vécues depuis plus de 20 ans :

  • L'un de nos clients a reçu d'un agent d'assurance une offre spontanée pour sa flotte de véhicules. Le contrat n'étant pas encore échu, notre client nous a interpelé pour connaitre notre position car la prime était incroyablement inférieure à celle qu'il paie aujourd'hui (25% de moins) ! Nous avons donc analysé les couvertures, persuadé que la probablématique venait de prestations supprimées... Cela n'est pas le cas, donc il faut chercher ailleurs. Sachant que sur les 5 dernières années, notre client avait subi un grand nombre de sinistres, et par expérience des appels d'offres que nous faisons régulièrement, il nous semblait impossible d'arriver à une telle prime. La seule possibilité serait un rabais extraordinaire, octroyé en général lorsqu'il n'y a pas de sinistre. La question qui reste ouverte est la suivante : si un agent vous propose une prime qui ne tient pas compte de la sinistralité et que vous signez ce contrat, que se passera-t-il lors du prochain sinistre, car c'est bien vous qui êtes responsable des élements enregistrés lors de la conclusion ?
  • Une femme ayant subi le coup du lapin dans un accident de voiture a déclaré son sinistre en « bagatelle » (pas d’arrêt d’activité et donc pas de préjudice pécuniaire, seulement des frais pour les soins d’un ostéopathe) chez son employeur, car elle peut s’arranger dans des horaires libres… Après quelques mois, comme les soins sont encore nécessaires, l’assureur incriminé lui envoie une belle lettre, qui fait référence à une jurisprudence, et qui la renvoie auprès de sa caisse maladie car l’accident est considéré comme terminé ! Elle va donc subir l’application de sa franchise (Frs 2000.-) sur deux années puisque ce cas passe d’une année à l’autre… Que va faire cette personne la prochaine fois ? Ne pas manquer de se faire mettre en arrêt, vu la reconnaissance qu’il y a eu de ne pas profiter de l’assurance ? Surtout tomber dans une « rechute » pour éviter la prescription de la jurisprudence ?
  • Pour conclure une perte de gain ou une assurance vie, les futurs assurés doivent remplir un questionnaire médical, dont l’une des phases mentionne le poids et la taille… Notre client, qui annonce 185 cm pour 110 kg, reçoit une réponse qui lui impose une surprime conséquente car il ne correspond pas au BMI (IMC) normal (surpoids voir obésité)… Pourtant notre client fait du sport 5X/semaine (natation et vélo) depuis des années (ses test de fréquence cardiaque son excellents)… Le médecin-conseil de l’assureur n’a même pas pris la peine de le contacter, ni son médecin d’ailleurs ! Le poids étant un élément très variable dans le temps, difficilement contrôlable rétroactivement, les assurés vont-ils minimiser cet élément dans les réponses à l’avenir (surtout les sportifs) ?

 

Imaginez donc le dilemme qui se pose depuis quelques temps aux courtiers, censés défendre les intérêts de leurs clients, mais qui ne peuvent décemment pas conseiller de mentir (conséquence légale et morale ?) à l'assureur, alors que certains n'ont pas cette même éthique...

«A chacun son métier et les vaches seront bien gardées…»

Dans la suite logique de notre rubrique, nous est apparue une question fondamentale : «Irons-nous bientôt chez le boucher pour acheter le pain, ou encore à la pharmacie pour trouver une robe de soirée et ainsi de suite ??»

Et bien oui, plusieurs grands assureurs ont passé des accords pour que les garagistes représentants de certaines marques puissent vendre directement les assurances avec le véhicule. Ces contrats sont intéressants pour le consommateur (primes plus avantageuses de 20 à 30 % ainsi que certaines conditions, notamment les franchises)… En tant que courtiers, nous devrions êtres contents pour le consommateur me direz-vous, puisque c'est le même but (rapport qualité-prix) que nous recherchons…

On pourrait comprendre éventuellement une diversification des canaux de ventes dans la compagnie (agents directs, courtiers, garagistes) si les conditions étaient identiques pour tous. Mais les agents de la compagnie ou les courtiers ne peuvent même pas proposer ces conditions préférentielles…

Alors, qu'il y ait une rivalité sur le marché entre les assureurs, c'est bénéfique pour tous, en principe, mais lorsque la concurrence se fait au sein même de la compagnie, il y a un gros problème de crédibilité !!

Le message de ces assureurs à leurs clients actuels est-il le suivant : «Voyez, nous sommes capables de baisser nos primes, de modifier nos conditions à la tête du client, et la plupart de vous êtes des pigeons qui payez beaucoup plus cher que nécessaire ! » ? 

J'anticipe déjà sur le commentaire suivant : « Il est fâché car il perd sa commission » en répondant que non ! En effet en tant que courtier nous offrons un service global à nos clients et ce n'est pas la commission de gestion sur un véhicule qui influencera notre relation. Mais c'est une question de principe, car on en revient à l'assurance en tant que bien de consommation, où le service n'a plus de valeur ! N'oubliez pas que le plus important dans l'assurance, c'est la couverture lors du sinistre, avec une personne capable de répondre en face de vous, et pas seulement la prime payée chaque année…

Mon avis, spécialement en tant qu'actuaire (ingénieur des assurances), se base sur le principe d'évaluation des risques, qui veut que la prime soit basée sur la probabilité du sinistre. Mais là ces assureurs nous prouvent qu'ils ont encore beaucoup de marge économique en plus du risque réel !!

J'imagine encore la motivation des agents directs, au sein de ces compagnies, quand on leur fait clairement comprendre qu'ils sont moins considérés que les garagistes, vu que le conseil passe inaperçu… Finalement, il ne faut plus s'étonner du roulement de personnel dans les compagnies d'assurance…

Nous pouvons faire le parallèle avec les habitués des achats par internet, qui n'ont plus assez de considération pour le conseil à la clientèle et le service après-vente.